La Femme du Shogun (Lesley Downer)

Lesley Downer, La femme du Shogun, City Edition 2017 (trad. fr.) 509 pages. (BANQ D7484f)

Il nous est difficile de comprendre les raisons qui ont poussé les Japonais à attaquer Pearl Harbour, sachant que cela allait entraîner un combat à finir entre l'empire états-unien en émergence et celui que dominaient les shoguns depuis des siècles.

Ce roman nous fait traverser le mur de bambou et adopter le point de vue d'un peuple qui avait subi l'humiliation de se voir arracher une ouverture de son territoire et une remise en question de ses coutumes par les "bateaux- monstres noirs" du Commodore Perry. Les Japonais maintenaient pourtant des relations commerciales "civilisées" avec les Hollandais. Mais ils avaient déjà assisté à l'invasion britannique de la Chine et constaté que les "barbares" n'avaient aucun respect pour les traditions et pratiques quotidiennes des pays qu'ils soumettaient à leurs ambitions commerciales.

L'auteure a vécu plus de dix ans au Japon. Elle a écrit de nombreux livres sur l'histoire japonaise. Son roman "La dernière concubine" est un best-seller.

Nous suivons l'ascension sociale d'une jeune femme, Okatsu (qui va changer de nom à chacune de ses promotions). Fille d'un petit noble, elle va se retrouver, sous l'impulsion de la stratégie d'un seigneur qui cherche à occuper les plus hauts niveaux du pouvoir, au Palais des Femmes, aux côtés d'un jeune Shogun instable à tous points de vue.

Certains seigneurs doivent leur rang àleurs filles qui, à l'instar des comètes, traversent les cieux en laissant une traînée lumineuse derrière elles. Nous les appelons les "seigneurs lucioles".

500 pages, c'est beaucoup de pages... mais nous n'avons jamais l'impression de perdre notre temps dans la description de costumes, de décor, d'humeurs, de rituels qui nous feraient oublier le déroulement de l'action.

De courtes mises en scène de paysage.

L'air de la clairière était imprégnée des odeurs de pin, de fougères, de mousse et de rosée. Les corbeaux croassaient, une alouette chantait.

Des portraits finement ciselés.

C'était un homme grand et musclé,  bien bati, fort. Elle se surprit à se demander ce que ressentaient les femmes qui partageaient la couche d'une telle créature.
...
La peau doré,  la bouche charnue, les grands yeux noirs qui semblaient toujours tournés vers l'avenir.
...
Il transpirait copieusement, dégageant une forte odeur de viande.

 Le secret de cette "longue légèreté" réside probablement dans le fait que nous découvrons tout cela à travers les yeux du personnage principal. Nous n'avons jamais l'impression que tous ces éléments n'existent que pour faire notre éducation quant à l'univers japonais. Car c'est d'abord l'éducation de la jeune fille dont il s'agit... Nous ne faisons que l'accompagner dans la découverte des différentes strates sociales de cet univers.

Cela est d'autant plus vrai dans le cas de l'arrivée - ou du débarquement - des "barbares" états-uniens. Certes, l'ouvrage publié en 2016 ne pouvait être inspiré par les actions les plus récentes du président TRUMPeur. Mais cela ressemble tellement à notre actualité que nous nous découvrons une grande sympathie pour ceux qui en 1853 ont dû subir le débarquement des "barbares"...

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