La vengeance de Richelieu (Jean-Michel Riou)
Jean-Michel Riou, 1630 La vengeance de Richelieu, Flammarion 2009. 442 pages.
C'est évidemment le titre qui a attiré mon attention. Je suis un admirateur inconditionnel du Cardinal… comme je l'ai démontré en publiant « 10 leçons de management selon Richelieu ». J’étais désolé que la caricature qu'en ont fait Alexandre Dumas (Les Trois Mousquetaires, Le Sphinx rouge) et Alfred de Vigny (Cinq-Mars) soit la seule image qu'en retiennent les lecteurs qui s’intéressent encore à ce qui s'est passé avant Donald Trump.
Jean-Michel Riou ne m'a pas déçu. Il nous décrit un Richelieu portant l'ensemble des émotions qu'un homme, dans sa situation, aurait dû ressentir.. Il le fait à travers le premier tome des aventures d'un jeune homme qui devient membre de la « famiglia » de Richelieu, ce clan très sélectif de personnes qui, fonctionnant dans différents secteurs de la société française, se sont mis, très discrètement, au service du Cardinal, beaucoup plus par principe que par intérêt. Apprenti chez l'architecte chargé de construire le Palais Cardinal (cédé au roi à la mort du Cardinal et devenu le Palais Royal), Antoine devient l'un des protagonistes (pro-Richelieu) de la célèbre Journée des Dupes au cours de laquelle la Reine-mère et le frère du roi avaient cru, à tort finalement, avoir convaincu le roi de renvoyer le cardinal-ministre.
Marie de Médicis, reine et mère de Louis XIII, était l'exemple même de la passion destructrice qui s’exerçait à l’égard du Cardinal. Hier, ces deux-là chantaient en canon, se servaient réciproquement de l'autre pour satisfaire leurs appétits. Ainsi, Richelieu avait gravi les échelons, gagné les sommets, s'imposant auprès du roi par l'action de Marie de Médicis une protectrice qui ne voyait que par lui. Aujourd’hui, telle une femme blessée ou trahie, semblable à ces fureurs italiennes qu'un sang chaud ne cherche qu'à enflammer, la reine mère cherchait à écarter celui qui, devenu son concurrent, l’éloignant du monarque son propre fils.
En fait le roman se divise en trois parties. La première raconte les évènements ayant amené le héros à Paris. La deuxième traite la Journée des Dupes. La troisième, et la plus importante, d'une autre conjuration visant à remplacer le roi par son frère et à redonner aux nobles les pouvoirs que Richelieu avaient commencé à centraliser entre les mains du roi… et de son ministre.
Ce qu'il y a de très intéressant, c'est la façon dont l'auteur introduit la Nouvelle-France dans le fil de son histoire. Le jeune homme est, au départ, proche des investisseurs dans La Compagnie des Cents Associés, au moment où les frères Kirke ont occupé, au nom de l’Angleterre, la colonie de Québec. Et je laisse aux prochains lecteurs le plaisir de découvrir comment la Nouvelle -France va de nouveau s'introduire dans la conjuration dont il est question dans la troisième partie.
L'auteur écrit dans un style qui participe à l’élégance de l’époque, traitée sans tomber dans les ornières d’un exotisme hermétique et surchargé.
Il sait construire la narration d'une action avec beaucoup de talent. Je suis resté ébloui par le rythme d’une poursuite en carrosse et chevaux. La variance des phrases réussit à nous couper le souffle.
Il sait aussi réaliser des descriptions de lieux où l'action mène ses personnages. On ressent, alors, comme une pause imposée par des plaisirs que l’auteur prête à son héros, mais qui sont visiblement inspirés par les siens.
Ainsi il passe par le Jardin du Luxembourg.
Ici, et depuis toujours, la douceur, l’équilibre dominent, inventant un tableau changeant à chaque rendez-vous, à chaque saison. Il faits s’y rendre en hiver pour écouter l'endormissement de la faune et de la flore, prisonnières d’une chape glacée qui se fendille sous le pas. Au printemps, il faut venir pour s’étourdir du parfum de ses roses dont on dit qu’il s'en compte autant que d'amours venues de confier ou gémir sur leur passion… »
Et il y a la surprise d’une lettre qui serait signée par Voltaire. Le philosophe y donne une étonnante explication de sa prise de position préférant, à la signature d'une paix avec l’Angleterre, le retour des Antilles à celui de la Nouvelle-France et de ses « arpents de neige » .
Mais c'est un roman….
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